lundi 5 juin 2017

Isabelle Eshraghi

Mon identité iranienne s’est révélée grâce à mes photographies. Certes, comme je suis née à Ispahan, d’un père iranien, cette appartenance restera toujours imprimée sur tous mes papiers d’identité. Elle est écrite.  Ayant quitté l’Iran dès mon plus jeune âge et n’en ayant aucun souvenir, je ne pouvais pas me sentir iranienne. Jusqu’au jour où j’ai décidé de découvrir ce pays qui est aussi le mien : c’était en 1996. Munie du vieux passeport de l’époque du Shah de ma mère française, où j’apparaissais, bébé joufflu, sur une photo d’identité en quatrième page, que j’avais raturé enfant en écrivant « non connue », je suis allée à l’ambassade de la République Islamique d’Iran à Paris, espérant obtenir un visa.  « Pas besoin de visa, m’avait annoncé l’employé du consulat, vous êtes iranienne ! » Ce premier passeport avec une photo d’identité à l’âge adulte s’est usé au fil du temps, rempli de tampons d’entrée et de sortie du pays : « Téhéran, aéroport de Mehrabad », « Téhéran, aéroport Imam Khomeiny », « Ispahan, aéroport Shahid Behesti ». J’ai arrêté de compter les voyages depuis le trentième et unième, tout quasi avec un but photographique ! Chacun d’entre eux m’a appris à me sentir de plus en plus iranienne.  Au tout début lors de mes premiers pas sur la terre de mes racines, ce sont les femmes d’Ispahan qui m’ont montré l’exemple. Je cherchais à découvrir, à travers elles, quelle femme j’aurais pu devenir si j’avais grandi en Iran. En observant leurs petits gestes du quotidien, j’ai compris ce que signifiait être une épouse, une mère, une femme au foyer, une travailleuse, une citoyenne. Ces instants de vie partagés de l’intérieur sont pour moi des moments complices, des souvenirs en images qui s’étaient effacés de ma mémoire et que j’ai reconstruits au cours de ces années.  À présent vingt ans plus tard, je peux dire que j’ai trouvé « mon iranité, je dirais même plus : mon isfahanité ». Je ne vais pas omettre mon identité française, celle-ci a toujours été là, je n’ai pas eu besoin d’aller la chercher. Cette moitié française qui regarde sans cesse l’autre moitié iranienne et vice-versa.  Isabelle Eshraghi
Je vous ai mis son site











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